Avully

Au cœur de la Champagne genevoise

L’histoire d’Avully, respectivement celle de son temple, est intimement liée à celle de la Champagne genevoise (voir Chancy et Cartigny).

Le Circuit découvertes historiques, inauguré en 2016 à l’occasion du 300ème anniversaire de la dédicace du temple, vous propose 14 points d’intérêt dans le village d’Avully, couvrant plus de vingt siècles de son histoire. Il faut compter une toute petite heure pour le parcourir (voir LIENS).  

Il a été conçu par Claire Gilliéron avec l’appui de la paroisse de la Champagne et du comité d’organisation de la manifestation.

Notons que quatre postes sont directement liés à l’histoire des Huguenots. En arrivant dans le village, vous passez tout naturellement devant les postes 12, 11 et 10 et en le quittant non loin du poste 6. Vous trouverez quelques informations à leur sujet dans le développement historique

Développement historique

Domaine de Normandie

Une histoire qui commence au XVIème siècle à Noyon, en Picardie.

Laurent de Normandie (1510-1569), lieutenant du roi de France et maire de Noyon, ayant rallié la Réforme, se voit contraint de fuir et arrive à Genève en 1548 où il s’installe définitivement. Quelques années plus tard, il est reçu à la bourgeoisie et assume bientôt des responsabilités gouvernementales, tandis que dans son pays il est condamné au bûcher et brûlé en effigie. Célèbre imprimeur-libraire et ami proche de Calvin, venu comme lui de Noyon, Laurent de Normandie s’engage activement et financièrement dans la diffusion des idées de la Réforme avec la collaboration de sa seconde épouse, Anne de Normandie née Colladon (1520 – ?) et des marchands ambulants et colporteurs.

Notons que les Colladon, originaires du Berry sont aussi accueillis au milieu du XVIème s.  Ayant rapidement reçu la bourgeoisie de leur ville d’adoption, certains d’entre eux, tels Germain et Nicolas, frères d’Anne, eux aussi proches de Calvin, s’illustrent notamment dans le droit, l’édition, la politique, la diplomatie, ou encore le pastorat

… et plus de deux siècles plus tard, Henri (1772-1856) un des nombreux descendants Colladon, devenu maire d’Avully, dit aimer jouer dans son jardin avec ses petits-enfants, dont l’un, Henry, fils de sa fille devenue une Dunant par mariage, sera un des artisans de la création du Comité International de la Croix-Rouge et recevra en 1901 le premier prix Nobel de la Paix (voir CICR).  

Le temple d’Avully

Dès son passage à la Réforme le 21 mai 1536 (voir Maison Mallet) et pour la première fois dans l’histoire, le Conseil Général déclare obligatoire, et pour les pauvres, gratuite, l’instruction élémentaire pour les garçons et les filles. Calvin estime que l’enfant, même illégitime, étant une créature de Dieu a droit à la culture.

La Compagnie des pasteurs ne peut engager que de modestes disponibilités financières pour les écoles primaires et ne craint pas de nommer un réfugié pour le poste de régent d’une paroisse rurale. Il sera peu rétribué et devra éventuellement exercer un autre métier. Une enquête menée en 1703 par la Compagnie révèle que les trois quarts des maîtres et maîtresses d’école sont d’origine française.

C’est le cas à Avully : le 5 janvier 1720, on apprend qu’après une requête en faveur de Paul Ebruy* maître d’école d’Avully, le Conseil lui a accordé « une coupe de bled d’augmentation de gage en considération de ce qu’il lit et chante à Avully ».  

Et en janvier 1735, une nouvelle requête est adressée à la Compagnie par le même Ebruy*, maître d’école d’Avully : vu son âge et ses infirmités ne lui permettant plus d’assurer ses fonctions, il demande sa décharge et prie aussi la Compagnie de lui procurer la conservation de son gage… Il décède peu de temps après avoir quitté ses fonctions.

Deux siècles plus tard, pendant la deuxième guerre mondiale, en août 1944, deux mille Savoyards et Gessiens arrivent à Chancy, fuyant leurs villages de Chevrier, Vulbens, Valleiry et Bloux, ainsi qu’Asserens, incendiés par les SS. Ils sont logés chez les habitants, dans les écoles, mais aussi dans les temples de Chancy, Avully, Cartigny et dans l’église d’Avusy, transformés en dortoirs pendant une dizaine de jours.

* Paul (ou Jean-Paul) Ebruy (1668- ?) a été prédicant pendant 20 ans en Ardèche, dès 1689. Puis il s’exile en Suisse et devient maître d’école à Chancy et Avully. A la demande d’Antoine Court pasteur et historien (1695-1760) né en Ardèche et mort à Lausanne, il a rédigé “Mémoire de ce qui s’est passé dans le Vivarais au sujet de la Religion”.

Le Domaine Mottu

Si l’astronome Jacques-André Mallet (1740-1790) pouvait observer le ciel du toit de sa maison d’Avully, c’est non seulement grâce à sa mère, mais aussi grâce à sa grand-mère Hélène Saladin (1690-1743) !  

Cette dernière était membre d’une famille dont les ancêtres, marchands drapiers, étaient partis de Lyon pour cause de religion à la fin du XVIème siècle. Arrivés à Genève, ils étaient rapidement devenus des bâtisseurs. (voir Grand Malagny). Hélène Favre née Saladin, avait elle-même hérité le domaine de son père Antoine Saladin (1638-1709).

Puis elle le lègue à son tour à sa fille Dorothée qui, après avoir épousé Jean-Robert Mallet (1702-1771) donne le jour à leur fils Jacques-André, futur fondateur du premier Observatoire de Genève (voir Observatoire de Genève) !

Au décès de sa mère, Jacques-André Mallet hérite donc du domaine qui comprend une maison de maître, des bâtiments agricoles et des terrains en pente vers le Rhône, sur lesquels il se livre aux expériences qu’il relate dans son célèbre Journal d’Avully. Il décède à Avully, à l’âge de 50 ans sans laisser de descendant.

Plus tard, ce magnifique domaine, constitué entre le XVIIème et XVIIIème siècle par la famille Saladin, passe en mains de la famille Mottu, originaire de Haute-Savoie et venue s’établir à Genève au moment de la recatholisation du Chablais à la fin du XVIème siècle.

Le Bac d’Avully

Il y avait un port fluvial dans la boucle du Rhône, au nord d’Epeisses, à l’époque romaine. Puis un pont sur le Rhône est mentionné en 1291. Il relie les châteaux d’Epeisses (rive gauche) et de Corbières sous Challex (rive droite). Après sa destruction, il est remplacé par un bac situé sous Avully jusqu’à la construction plus en amont du pont de La Plaine en 1857.

Dès la Révocation de l’Edit de Nantes en 1685, un siècle environ après le Premier Refuge qui suit le massacre de la Saint-Barthélemy (1572), Avully assiste à l’exode massif des Huguenots qui empruntent son bac pour fuir les persécutions.

Mais déjà à partir de 1661, les protestants du Pays de Gex, qui forment encore la grande majorité de la population, sont opprimés par le gouvernement royal de Louis XIV. Ils mettent en sûreté leurs biens et leurs récoltes en terres genevoises, et sont prêts à s’y réfugier lorsque se déclenchent les dragonnades. Sur les vingt-trois temples que compte le baillage gessien, vingt-et-un sont rasés.

Puis les contrebandiers de tabac remplacent les Huguenots ; en 1776, venus du Pays de Gex français et allant en Savoie, ils font monter dix-sept chevaux chargés de ballots de tabac par la Vy-de-Brand. Toutefois, lorsque Genève demande à noble Chapeaurouge d’enquêter sur ce trafic, il répond qu’« effectivement la contrebande a lieu au pont d’Avully chez le cabaretier du village, mais tous les habitants sont de braves gens ».

En 1815, Henri Colladon le maire d’Avully, aidé par quelques robustes villageois, va enlever le bac pour empêcher les troupes françaises de traverser le Rhône.

Au fil du temps, la Vy-de-Brand devient un simple raccourci après la construction de la route d’Avully.

(Sources et ouvrages consultés : Notices généalogiques Fonds Galiffe – Archives commune Avully – Archives Journal l’Extension –  Archives Compagnie des pasteurs – Dictionnaire historique de la Suisse – Maisons de campagne genevoises au XVIIIème s. tome 2 Christine Amsler éd. Domus Antiqua Helvetica, 1999 – Plaquette Genève 1536 Gabriel Mutzenberg – Genève et la Révocation de l’Edit de Nantes Société d’histoire et d’archéologie de Genève – Chancy commune genevoise Pierre Bertrand – Ponts de Genève Anita Frei)

Route du Moulin-Roget 8, 1237 Avully

EN IMAGE

A découvrir également

Chancy
Cartigny
CICR
Maison Mallet
Grand Malagny
Observatoire de Genève

Liens

Bibliographie

  • Avully, commune genevoise – P. Bertrand, in Bull. de l’Institut national genevois, 1952, 86-130
  • Henry Dunant le prédestiné – Gabriel Mutzenberg Ed. Robert Estienne 1984

Les présentes informations sont communiquées sous toute réserve, au plus près des connaissances et recherches de la rédactrice. L’Association décline toute responsabilité en cas d’erreur ou omission.